À la question « trouvez-vous normal que le gouvernement utilise l’article 49.3 de la Constitution pour gouverner la France, 83,12% des personnes qui ont été interrogées ont répondu par la négative, allant dans le même sens que beaucoup de Français qui dénoncent le déni de démocratie de ce gouvernement. 11,25% considère que cette utilisation du 49.3 est prévue par la Constitution, et que par conséquent, son utilisation est acceptable. 5,63% préfère ne pas se prononcer sur ce sujet technique.

L’article 49.3 est un outil prévu par le général de Gaulle dans la Constitution de 1958, qui permet au chef de l’exécutif d’avoir le dernier mot en cas de blocage de l’Assemblée lors du vote de certains projets ou propositions de loi spécifiques. Concrètement, le Premier ministre peut décider, pour contraindre la majorité des parlementaires à voter une loi qui lui est précieuse, d’« engager la responsabilité du gouvernement », c’est-à-dire de poser une question de confiance aux membres du Parlement. Ceux-ci peuvent alors décider de déposer une « motion de censure » pour montrer leur défiance. Si les parlementaires décident de déposer une motion de censure, celle-ci est débattue et votée. Son adoption – même si ce cas ne s’est jamais produit depuis 1958 – entraînerait la démission du Gouvernement et le rejet du texte sur lequel il avait engagé sa responsabilité.

Si aucune motion n’est acceptée, ou en cas de rejet de la motion comme cela a été le cas récemment, le projet ou la proposition est considéré comme adopté. L’usage du 49.3 est limité au vote d’un projet de loi de finances ou de financement de la sécurité sociale et sur un seul autre projet (ou proposition) de loi au cours d’une même session. Il faut noter qu’auparavant, le Gouvernement pouvait y recourir autant de fois qu’il l’estimait nécessaire et quelle que soit la nature du texte (de 1988 à 1993, le Gouvernement a ainsi utilisé l’article 49.3 à 39 reprises). Depuis la révision constitutionnelle de 2008, son usage est donc limité.

Même si le 49.3 est prévu par la Constitution, son usage constitue un aveu de faiblesse, et son abus est une preuve que, malgré le soutien médiatique massif dont il bénéficie, Emmanuel Macron n’a en revanche pas le soutien de la population dont une grande partie est représentée par les députés de l’Assemblée nationale. Ce formidable aveu de faiblesse doit nous alerter sur la suite de ce quinquennat : notre pays est gouverné par un président de la République qui s’est habitué à ne rencontrer de véritable résistance que dans les rues et à réprimer les « gilets jaunes » ou les « anti-vax » violement. Face à l’Assemblée nationale, il ne pourra pas utiliser de LBD ou de CRS. Il devra donc diviser pour mieux régner et se trouver des alliés dans certains groupes de l’hémicycle : chez les Républicains notamment ou dans le groupe Libertés et Territoires.

Au sujet du 49.3, retrouvez le dernier billet d’humeur de notre délégué départemental de Mayenne dans le VIA infos n°7 :

49.3 L’autoritarisme ?

Si nous étions aux affaires, nous, la France d’en bas ulcérée, en colère et désabusée. Si nous étions aux affaires, nous les payeurs de taxes, d’impôts et de prélèvements… Nous les mal enseignés, mal soignés, mal protégés, mal justiciés, chaire à profits et corvéables, sans nul doute, nous l’utiliserions ce 49.3. Face à une assemblée d’opposants idéologues ou de macronistes apparatchiks, c’est à grand coup de 49.3 que nous passerions outre les tergiversations et amendements pour mettre en œuvre les réformes que réclame ce pays : réforme de l’éducation nationale, de la justice, de la santé. 49.3 pour nationaliser Orpéa, 49.3 pour plus de sécurité, 49.3 pour moins de McKinsey, Uber et Amazone. Qu’un pays en déliquescence soit dirigé par un homme, parfois ferme, porté par le peuple, n’est pas une offense à la démocratie. L’autorité n’est pas le problème, l’autoritarisme si ! Et la différence tient dans la légitimité et la crédibilité de celui qui l’utilise et de la façon dont il l’utilise. Le président Macron n’a ni l’une ni l’autre. Sa légitimité est entachée, son pouvoir n’est pas du peuple mais des médias acquis et des lobbys marchands. Sa crédibilité, est dissoute par ses mensonges et dissimulations, par sa gestion honteuse de la crise du covid et son alignement servile dans celle de l’Ukraine. Assurément le danger dans ce pays n’est ni sa constitution ni son article 49.3 mais son président. Mais qu’ils prennent garde, lui et son autoritarisme. Le peuple a aussi son 49.3 et sa motion de censure : les jacquerie, révoltes et révolutions. Si Cyrano avait des fourmis dans son épée, nous c’est le gilet jaune qui commence à nous gratter.

Thierry Pouchol